Conversation avec François, notre pilier sur le secteur de place d’Italie
Pour cette newsletter en ce début de nouvelle année, nous avons voulu mettre en avant l’une de nos lucioles les plus fidèles, François. Son implication sur tous les sujets et sur le terrain en font un pilier de l’association. Nous lui avons posé quelques questions.
* Peux-tu te présenter en quelques mots ?
François (lui/il), 38 ans. Professionnellement, j’ai toujours évolué dans le milieu académique et j’ai donc atteint une certaine stabilité économique et géographique relativement tard. J’ai vécu en pas mal d’endroits différents, ce qui m’a amené à apprécier la diversité.
* Depuis combien de temps, comment et pourquoi avoir intégré la Balade des Lucioles ?
Je suis arrivé à Paris fin 2016. J’ai d’abord mené ma vie sociale dans le milieu de mon travail. Début 2018, j’ai voulu élargir mon cercle de connaissances sur Paris, et j’ai testé pour l’occasion un site web dont j’avais entendu parler : OVS. Parmi les petites annonces de sorties, seule celle d’Aurélie me tentait. Rendez-vous était donc pris devant le McDonald’s de la Gare d’Austerlitz. J’y ai rencontré Mohammed, Salah et Shane. J’étais le petit nouveau, avec Fares. À cette époque-là, Aurélie aussi était tout le temps sur le terrain. D’ailleurs, c’est elle qui marchait le plus vite et portait le plus.
À l’époque, la maraude secteur 13e partait donc d’Austerlitz, et on poussait jusqu’à la Gare Montparnasse. Ce parcours me convenait car je travaillais près de Montparnasse et je dormais en fugitif sur mon lieu de travail.
Ce qui m’a fait rester, ce sont les lucioles de l’époque. Il y a eu de folles maraudes, des galères aussi, et je garde de bons souvenirs de mes deux premières années en luciole. J’espère transmettre encore un certain esprit de la maraude, que j’ai hérité de Mohammed. Observer. Chercher à comprendre les gens, leurs besoins. La rue offre une grande diversité de visages, de parcours. On n’en finit jamais d’apprendre.
* En plus d’être présent physiquement sur les maraudes, tu fais beaucoup de tâches « dans l’ombre ». Peux-tu nous en parler ?
Ce sont beaucoup de petites contributions, dont l’impact sur l’association telle qu’elle est aujourd’hui est sans doute exagéré par certaines personnes. Je peux mentionner la procédure de reconnaissance d’utilité générale, comme un exemple (rare) d’action ponctuelle à l’impact durable. Mais dans la pratique, je crois que la plus grande contribution, c’est un peu la même que beaucoup d’autres bénévoles : être là régulièrement, tisser des liens, avec les personnes dans la rue comme avec d’autres acteurs de la solidarité… Je le fais sur le terrain, mais effectivement pas que. En tout cas, c’est le travail du temps qui apporte du poids à tout cela.
J’assiste Aurélie sur pas mal de tâches. Heureusement, nous sommes de plus en plus nombreux et nous nous répartissons de mieux en mieux les tâches. Si sur le terrain on ne me voit que secteur «Italie», et que j’ai pris en charge une bonne part du relationnel avec nos partenaires sur ce secteur, l’administratif concerne aussi pas mal l’association dans son entièreté.
* Récemment, tu as organisé quelques ateliers avec des enfants avec Môm Tolbiac. Peux-tu nous expliquer de quoi il s’agit et à quoi ça sert ?
Môm’Tolbiac est un partenaire précieux. Nous les avons connus en décembre 2020, à l’occasion de l’opération des boîtes de Noël. Par la suite, plusieurs collectes de produits d’hygiène ont été organisées chez eux (ou chez elles, on peut dire). Plus récemment, a eu lieu un atelier avec les enfants, effectivement.
Je tiens à préciser, par contre, que je n’ai rien organisé moi-même. C’est Ana, Mélisande, et peut-être d’autres, de Môm’Tolbiac, qui sont à l’initiative des collectes comme de l’atelier. Et c’est un peu en cela qu’elles sont un partenaire précieux. Toujours force de proposition.
C’est aussi par leur biais que nous sommes entrés en contact avec l’équipe municipale du 13e arrondissement et, de fil en aiguille, avec le Samusocial de Paris pour la coordination des maraudes secteur sud.
En ce qui concerne l’atelier, c’est Caroline et Cendryne (que les 15ièmistes connaissent bien) qui ont préparé et animé les échanges avec les enfants. Pour Môm’Tolbiac, qui reçoit donc des enfants de 4 à 11 ans après l’école, l’idée était (et est encore) d’animer une série d’ateliers autour du thème de la solidarité. À l’occasion d’un de ces ateliers, nous étions invités à venir parler des maraudes et du public auquel nous venons en aide, pour amener les enfants à intégrer dans leur vision du monde ces personnes en difficulté, et leur présenter quelques clefs de l’entraide.
* Depuis ton implication dans l’association, as-tu remarqué des changements qu’ils soient positifs ou négatifs dans la rue ?
En fait, sur nos parcours dans le 13e et arrondissements voisins, il y a bien eu des changements, mais sans lignes directrices, je crois. Les déplacements de population sont souvent dûs à des travaux. Parfois nous sommes aussi les témoins de la formation de groupes imposants, en taille, qui sont ensuite évacués parce qu’ils deviennent trop grands.
J’ai plus envie de parler des évolutions du tissu de la solidarité. Peut-être simplement parce que j’ai moins de recul sur ce sujet.
Sur le secteur «Italie», par exemple, on croisait plus de groupes de maraude, cette année. Il y a eu un basculement net au début du second confinement, en novembre 2020. Nous avons eu un afflux massif de bénévoles, de toutes parts, y compris en provenance d’autres associations qui avaient elles-aussi trop de bénévoles. La situation a changé depuis, bien sûr, mais des associations se sont formées à cette même époque et on les croise encore ; certaines d’entre elles du moins.
D’autres associations ont disparu, ou ont bougé. J’imagine que leurs actions reposaient sur peu de personnes, qui n’ont pas pu rester engagées. C’est le cas de la plupart des associations, je crois, et la Balade des Lucioles a cette vulnérabilité-là aussi, bien sûr, mais de moins en moins. Je suis optimiste, parce qu’il y a à présent une belle synergie entre les trois équipes de secteur.